Ballon d’Or

L’évidence Rapinoe

34 ans, des cheveux roses, 6 buts lors de la dernière Coupe du Monde… Megan Rapinoe a été désignée ce lundi Ballon d’Or féminin 2019, succédant ainsi à Ada Hegerberg. Logique, pour nombre de spécialistes. Couru d’avance, pour ceux qui y voient un prix politique. Et si la réalité était entre les deux ?

Malgré un beau plateau, l’issue de cette seconde édition du Ballon d’Or féminin laissait entrevoir moins de suspense que chez les hommes. Difficile en effet d’imaginer Ada Hegerberg faire le doublé après avoir séché la Coupe du Monde en France. Et malgré un parcours (trop ?) parfait en club, les Françaises Amandine Henry et Wendie Renard n’ont pas su tenir leur rang cet été. Enfin, parmi les autres concurrentes, qui pouvait faire valoir un talent vraiment supérieur à celui de l’icône de l’année ?

Une récompense incontestable

Co-meilleure buteuse de la Coupe du Monde, meilleure joueuse de la compétition, MVP de la finale… Megan Rapinoe a vécu un mois de rêve en France, prolongé par le prix The Best FIFA en septembre. Sur le terrain, avec son équipe nationale, l’Américaine a dicté le jeu, offert du spectacle et montré une grande intelligence ainsi que de véritables qualités techniques. Reconnue aux Etats-Unis comme l’une des meilleurs joueuses de l’histoire, celle qui compte déjà 160 sélections pour trois titres mondiaux (2 Coupes du Monde et une médaille d’or olympique) a pourtant vécu une saison galère en club, avec seulement 6 matchs joués sur 25. De quoi faire tiquer les supporters lyonnais, mais pas les 43 journalistes membres du jury, qui l’ont tous placé au moins dans le Top 5. Mieux, 34 l’ont directement placée sur la première marche du podium. 230 points à 96 pour sa première dauphine, Lucy Bronze. Comme sur la pelouse du Groupama Stadium, Rapinoe n’a jamais vraiment eu d’adversaire à son niveau dans ce vote.

Difficile pourtant de dire qu’elle doit son trophée à sa seule Coupe du Monde. Mais l’ampleur de sa victoire, comme le classement des joueuses qui la suivent, révèle bien un tropisme dans la vision du football féminin qu’ont les observateurs. D’une part, l’exposition médiatique du Mondial est incontestable, quand on voit les places des Françaises Renard (6e), Henry (11e) et Bouhaddi (dernière avec 0 point), mais aussi celle de la Danoise Pernille Harder, deuxième en 2018 et tombée à la 14e place. Celles qui sont passées au travers cet été en ont subi les conséquences. A l’inverse, Rapinoe a gagné 200 points et 8 places, Alex Morgan se place sur le podium et Rose Lavelle, révélation de la compétition, intègre le Top 10.

D’autre part, les observateurs ont encore beaucoup de mal à évaluer le véritable niveau des compétitions, en particulier celui de la Ligue américaine par rapport aux compétitions européennes. Malgré un triplé domestique et une énième Ligue des Champions, les Lyonnaises ne valent pas l’équipe nationale des Etats-Unis, même si Lucy Bronze se classe deuxième (avec une belle Coupe du Monde). Et la FA Women’s Super League, un championnat réputé pour sa consistance (tous les clubs sont professionnels, la lutte pour le titre concerne environ 6 équipes) ne place que deux représentantes dans le Top 10. Hegerberg, lauréate l’an passé, fait figure d’exception. Malgré sa grève estivale, l’attaquante se classe 4e. Impossible de la faire figurer sur le podium, mais elle a mené l’attaque lyonnaise à tous ses succès et reste, par sa récompense passée, une figure historique. Un aspect déterminant dans ce Ballon d’Or féminin.

Une icône nécessaire

D’une footballeuse engagée à l’autre. Ce Ballon d’Or féminin semble ne pas simplement récompenser la meilleure joueuse de l’année, mais aussi celle qui fait le plus avancer la cause du football féminin. Déjà bien connue pour son engagement outre-Atlantique, celle qui posa un genou à terre en soutien à Colin Kaepernick est devenue, en un été, une icône mondiale du girl power et de la lutte contre les discriminations de genre. Ouvertement lesbienne, en première ligne pour dénoncer la politique de Donald Trump, Megan Rapinoe ne concède rien, réclame, s’engage. Si Hegerberg a planté son équipe nationale pour protester contre la différence de traitement entre hommes et femmes par sa Fédération, l’Américaine a carrément foutu la sienne devant les tribunaux, avec l’appui de bon nombre de ses coéquipières.

Une fougue qui n’existe chez aucune Française. Pas de combat, pas de revendication, tout juste un mot ou une story Instagram pour le livre de Melissa Plaza. Rapinoe, dans France Football, revient sur son passage à l’Olympique Lyonnais en 2013, et regrette qu’aucune joueuse française n’ait fait son coming-out, allant même jusqu’à estimer que cela pourrait “les libérer sur le terrain”. La discrétion des Françaises, leur soumission au discours de la Fédération, leur absence de revendication, explique leur faible reconnaissance à l’international et donc leur classement au Ballon d’Or. Malgré leur popularité nationale, difficile d’en faire des icônes qui défendent haut et fort le droit des filles à jouer au foot. Or, pour continuer son oeuvre de légitimation, le football féminin a besoin d’une leader charismatique comme Megan Rapinoe.

Unanimement récompensée pour ses performances chaque fois qu’elle a joué cette saison, objectivement meilleure joueuse de la plus grande compétition internationale cet été, l’Américaine fait donc un Ballon d’Or logique et qui sert la cause de son sport. Un nouveau coup de projecteur sur le football féminin, pour montrer que les filles aussi ont du talent.

Xavier Regnier

L’évidence Rapinoe

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La liste des 30 joueurs nominés pour le ballon d’or 2019 a été dévoilée le 21 octobre. Parmi les 30 meilleurs joueurs du monde à l’heure actuelle, un nom brille plus que les autres, Virgil Van Dijk. Son nom brille plus que tous les autres, ou du moins plus que les autres humains, car il doit partager la lumière avec les éternels monstres du football mondial et encore favoris pour le ballon d’or, Lionel Messi et Cristiano Ronaldo. Mais cette saison, le défenseur Hollandais de Liverpool peut contester la couronne, fort d’une saison exceptionnelle, riche sur le plan individuel et collectif.

Un trophée controversé

Bien que le Ballon d’or France Football soit une distinction assez critiquée pour son manque d’objectivité et des sacres polémiques (Ballon d’or 2010 et 2013 par exemple). De plus, le trophée n’est quasiment remporté que par des attaquants ou joueurs à vocation offensive. Seulement 3 défenseurs, Franz Beckenbauer (1972 et 1976), Matthias Sammer (1996) et Fabio Cannavaro (2006) et un seul gardien, Lev Yachine (1963) ont remporté la plus haute distinction individuelle depuis sa création en 1956. Objectivement le Ballon d’or est censé être attribué au meilleur joueur de l’année en se basant sur ses performances individuelles, son influence au sein d’une équipe, son respect du fair-play, ainsi que les trophées glanés sur la saison observée.

Palmarès

Alors pourquoi Virgil Van Dijk mérite-il le Ballon d’or ? Tout d’abord, il est quasiment certain qu’il figure parmi les 3 favoris. On peut admettre que, malgré une saison qui reste au dessus des standards, (28 buts en 43 matchs toute compétition confondue) Cristiano Ronaldo accuse le coup du transfert du Real Madrid à la Juventus à l’été 2018. Il remporte une Série A, propriété de la Juventus depuis 2012. Il remporte également la Ligue des Nations mais le trophée est trop jeune pour avoir le même impact qu’un Euro voir d’une Coupe du Monde. 

Le véritable rival du défenseur des Reds est Lionel Messi. L’Argentin porte sur ses épaules un Barça plus aussi souverain qu’il y a quelques années, avec 51 buts en 50 matchs il est un monstre offensif, soulier d’or européen, capable de faire basculer un match. Messi remporte le trophée de meilleur attaquant de l’année pour l’UEFA. Mais avec seulement une Liga dans l’armoire à trophées et une piètre performance en Copa America le natif de Rosario se tire une balle dans le pied. Car face à lui, Virgil Van Djik remporte la reine des compétitions pour un club, la Ligue des Champions. Son rôle est indispensable et il a su se montrer décisif dans le parcours des Reds. Ajoutée à cela une exceptionnelle seconde place à 97 points (plus haut total pour un non-champion) dans le championnat le plus relevé du monde. Une finale de Ligue des Nations perdue contre le Portugal et de nombreuses distinctions individuelles : Meilleur joueur de Premier League, Prix UEFA du meilleur joueur d’Europe et meilleur défenseur UEFA. 

Performance

Si on observe les performances pures, il est évident qu’on ne peut pas comparer un attaquant avec un défenseur. Les rôles ne sont pas les mêmes. En effet statistiquement, Messi est indétrônable. Mais Van Djik n’est pas en reste sur le plan des exploits défensifs, il détient le stratosphérique record de ne pas s’être fait dribbler pendant 65 matchs ! De plus, sur la saison 2018-19 en championnat il est le défenseur ayant gagné le plus de matchs (28 sur 36) et ayant permis le plus de clean-sheets. Il remporte également 77% de ses duels disputés, 76,2% de ses duels aériens et réussit 74% de ses tacles. Un roc. Offensivement, il marque 6 buts en 50 matchs dont 1 but face au Bayern Munich en huitièmes de finale retour de Ligue des champions et un autre face à Porto en quarts. Il se montre également décisif en sélection où il marque, dans le temps additionnel contre l’Allemagne, le but pour la qualification en phase finale. En bref, là où Messi marque des buts pour faire gagner son équipe, Van Djik empêche d’en encaisser. On peut aussi relever l’opposition entre le FC Barcelone et le Liverpool FC en quart de finale de ligue des champions. Au terme d’une double confrontation historique c’est l’équipe de Virgil Van Djik qui a poursuivi son parcours soulignant indirectement la supériorité du défenseur oranje sur le meneur argentin.

Influence

Sur le terrain comme en dehors, le batave de 28 ans est un leader, capitaine de sa sélection, il est également troisième capitaine des Reds élu par le vestiaire derrière Henderson et Milner. Dans la défense c’est lui le patron. Depuis son arrivée de Southampton pour 84M d’euros au mercato hivernal de la saison 2017-2018, son influence dans la défense et l’équipe a transformé le visage du club de la Mersey. Autrefois son point faible, la défense est devenue plus rassurante et a permis à l’équipe de se rééquilibrer autour d’une colonne vertébrale plus solide. Cette sérénité se traduit par une augmentation des clean sheets mais aussi par le fait que la moyenne de points par matchs chute quand Van Djik ne joue pas, preuve que l’attaque de feu des Reds n’est pas sa seule arme pour gagner des rencontres. En tant que défenseur, il se montre très propre. En effet, en 6795 minutes jouées en club et sélection depuis le début de la saison 2018 jusqu’à aujourd’hui, il n’a écopé que 5 cartons jaunes et aucun carton rouge. À titre de comparaison, Léo Messi en 5217 minutes a récolté 3 cartons jaunes et 1 carton rouge. Sa propreté défensive, son leadership et sa capacité à se rendre décisif font de Virgil Van Djik un candidat idéal pour remettre en lumière les défenseurs, trop souvent oubliés par la reine des distinctions individuelles.

Eliot Poudensan

Pourquoi Virgil Van Dijk mérite Ballon d’Or