Le championnat anglais est réputé pour son niveau de jeu très élevé. La lutte pour le sacre y est acharnée. Tout fan de foot qui se respecte ne peut que prendre du plaisir face aux joutes anglaises du week-end. Mais quelles sont les raisons du succès de la Premier League, de sa pérennité au plus haut niveau et de ses spécificités comparé aux autres grands championnats ?
La Premier League est sans conteste le championnat où le fossé entre les équipes est le moins profond. On parle de « Big Six » en désignant les six favoris à la victoire finale en championnat. Comme l’observe José Mourinho, il n’y a pas vraiment de nette domination d’une seule équipe à l’image d’un PSG, Juventus ou Bayern dans leurs championnats respectifs. Même si il y a des tendances sur trois ou quatre ans. Aucun match n’est joué d’avance et chaque rencontre est une véritable bataille. Une équipe de bas de tableau a toutes ses chances contre une équipe qui joue les premiers rôles. Le trophée de Premier League a ainsi plus de valeur que ceux des championnats pliés en mars. Certaines équipes réservent aussi parfois de belles surprises. À l’image du sacre aussi inattendu que spectaculaire en 2015-2016 de Leicester.
David Beckham disait, à propos des anglais : « We have a lot of passion ; football is something which runs through our veins » (“nous avons beaucoup de passions, le football coule dans nos veines”). En effet l’engouement pour le sport qu’ils ont inventé se répercute sur l’attractivité du championnat d’outre Manche. Les stades sont immenses, avec une capacité moyenne de 37000 places. Le taux de remplissage y est élevé ce qui permet une ambiance toujours au beau fixe. Ces facteurs attirent les investisseurs. Les droits télés s’élèvent à plus de trois milliards d’euros répartis entre les 20 clubs. Ceci permet de dépenser des sommes colossale sur le marché des transferts, attirer des tops joueurs et donc rehausser le niveau sportif. Le championnat britannique propose aussi un grand nombre de derbys, ce qui augment le niveau d’implication d’un supporter. De plus la tradition oblige la tenue du « boxing day » : un jour de match le 26 décembre pendant que les autres championnats sont en trêves hivernale. Généralement ce sont des derbys qui se tiennent pour éviter de trop longs déplacements aux joueurs. Cet événement représente la quintessence de la passion anglaise pour le ballon rond.
Un aspect moins évident mais qui participe à rendre unique ce championnat : la volonté de faire ressentir au spectateur l’essence du jeu. Cela se traduit sur le terrain mais aussi par la retransmission télé. En effet, sur le terrain on remarque que l’arbitre s’efface le plus possible derrière le jeu. L’homme en noir est plus laxiste sur certaines fautes et ne donne pas de coup de sifflets quand la faute est incontestable, un simple signal verbal suffit. Les bords de terrains derrière les cages sont toujours épurés et pas pollués de publicités. Cela pour sublimer la beauté des actions, du but. L’habillage visuel doit être propre. En dehors des stades, c’est à la télé que les matchs anglais sont suivis. Les commentateurs, eux aussi, laissent la place au jeu. Ils ne tentent pas de meubler à tout prix et n’apportent que de courtes analyses et des éclairages. Ils laissent l’ambiance du stade faire le travail d’immersion. Le silence est d’or et les commentateurs préfèrent laisser le jeu s’exprimer. De plus la réalisation est épurée. Les plans larges sont favorisés pour une meilleur observation et analyse des actions pour les téléspectateurs. Cela va même jusqu’aux pelouses. Taillées pour favoriser un football rapide et offensif, ces billards sont aussi très agréables à regarder à l’écran. Tant de détails qui participent à l’immersion du spectateur, comme s’il était en tribune latérale.
I've talked about this before, but one of the reasons the Premier League is so popular is because of its vibrant colors on broadcasts. look at the difference here https://www.lafeuilledematch.com/site-gratuit-de-rencontre-entre-femme/
— ty (@finalthrd) August 27, 2018
La Premier League est crédible pour le titre de meilleur championnat pour toutes les raisons évoquées mais elle contient aussi quelques faiblesses et points négatifs. La prolifération de buts s’explique aussi par la faiblesse des défenses. L’écart commence à se creuser entre les très grosses écuries et les équipes plus modestes. L’écart se traduit financièrement, dans le jeu, au niveau tactique et donc dans le niveau de suspens ou de qualité de la compétition. De l’argent un peu gaspillé sur certains transferts comme ceux de joueurs anglais trop souvent surcôtés. Une formation anglaise très faible et à revoir. Des clubs de légende en perdition. Et enfin les tarifs pour aller au stade ne cessent d’augmenter et cela peut avoir des retombées négatives sur l’affluence et l’ambiance des stades. Mais ces facteurs ne font qu’à peine ébréché le monument qu’est la Premier League dans le paysage footballistique.
Eliot Poudensan
Sanctuaire des valeurs barcelonaises, la Masia est le centre de formation le plus réputé de la planète football. Mine d’or au début du siècle, elle n’est désormais que l’ombre d’elle-même. Les jeunes formés dans « la ferme » ne jouent plus les premiers rôles ni au Barça, ni en Europe. Système obsolète ou mauvaise gestion, y a-t-il un pilote dans la Masia ?
La Masia est le poumon de l’institution Barcelone. Le club catalan qui se vend comme « més que un club » crée ce centre de formation en 1979. Yohan Cruyff en est l’architecte conceptuel. L’Hollandais reconnaît l’importance d’une formation précoce et orientée. La Masia devient alors le berceau du jeu si cher au Barça, le tiki-taka valorisant le contrôle, le mouvement et la recherche d’espaces par le déplacement. Depuis 2011 le centre de formation a délaissé la ferme originelle pour construire un gigantesque complexe sportif pour élever et former de futurs champions. Le centre coûte 20 millions d’euros par an au club, ce sont les frais de fonctionnement les plus élevés au monde. La qualité a un prix. 16 équipes de jeunes et 270 joueurs y évoluent et s’imprègnent des 6 valeurs que prône l’institution blaugrana : 3 valeurs sur le terrain, position, possession et pressing. Et 3 valeurs dans le coeur, humilité, respect et ambition. Pour cela les jeunes pousses de la Masia bénéficient d’un accompagnement au quotidien, de la catégorie « infantil » jusqu’au Barça B : encadrement, suivi psychologique, physique, éducation. Rien n’est laissé au hasard pour assurer l’héritage de l’ADN FC Barcelone.
Ces jeunes joueurs sortant de la Masia obtiennent généralement leur chance avec le groupe pro. Avec plus ou moins de réussite. Entre les années 2000 et 2010 le cru obtenu est inestimable : Valdes, Puyol, Busquets, Xavi, Iniesta, Fabregas, Messi et bien d’autres. Les promesses de la Masia confirment et le FC Barcelone domine le football européen. Le Barça de Guardiola représente l’apogée du modèle blaugrana théorisé par Cruyff. L’équipe catalane réalise un sextuplé historique en 2009 avec une colonne vertébrale issue du centre de formation, dont l’entraîneur. En 2010 le trio de tête du Ballon d’or est composé à 100% de joueur formés à la Masia. La sélection espagnole championne du monde en 2010 aligne, lors de la finale, 6 joueurs ayant été formés dans le mythique centre de formation. En 2012, Tito Vilanova aligne une onze inédit essentiellement formé au club. C’est la consécration. Le modèle Barcelonais est alors à son apogée, l’équipe marque l’histoire de son sport et s’invite à la table des meilleures formations de l’histoire.
Mais alors pourquoi depuis quelques années les promotions n’arrivent plus à s’imposer en équipe première? Entre 2011 et 2018, seul Sergi Roberto a pu intégrer durablement l’équipe type. Les jeunes déçoivent et sont souvent prêtés, Munir, Bojan, Deulofeu. Ou s’exporte assez tôt à l’image de Thiago Alcántara ou Marc Bartra. De plus l’interdiction de recrutement en 2015 a forcé le Barça a miser sur des recrues préventives. Mais au delà de cette interdiction les direction catalane dépense sans compter sur le marché des transferts depuis quelques saisons : Coutinho, Neymar, Dembélé, Malcolm, Arthur, Griezmann… Et rarement avec succès. La génération 2010 de la Masia n’est peut-être tout simplement pas au niveau. Le football européen réclame un niveau de performance exceptionnel et le Barça B est depuis quelques saisons un habitué de la relégation. Tandis que le groupe pro peine à se renouveler. Les dirigeants font également le choix de recruter des joueurs pour compléter leur formation. Des jeunes de 17 à 20 ans intègrent l’équipe B et prennent la place des jeunes pousses. De plus arriver en cours de formation est un vrai défi car la méthode barcelonaise est extrêmement difficile à assimiler. Tous ces facteurs font que le prestige de l’académie s’effrite. Les aînés ont-ils placé la barre trop haute ?
Mais l’espoir renaît, une jeune génération de joueur en provenance de la Masia commence à obtenir des résultats. En 2018, le Barça remporte la Youth League. L’Espagne remporte l’édition 2019 de l’Euro U19 avec un bon nombre de catalan dans l’effectif. Cette saison le gamin de 16 ans Ansu Fati obtient du temps de jeu. Le cru est de qualité, il ne reste plus qu’à l’institution de le sublimer.
Eliot Poudensan
Un talent gâché est un joueur qui n’a pas réalisé la carrière que son talent lui prédestinait.
Le foot est un milieu cruel, ou le talent pur ne suffit pas. Les joueurs doivent travailler, s’entraîner, gérer leur image et faire les bons choix tout au long de leur carrière. Certains se sont brûlé les ailes, d’autres ont été victimes de graves blessures à répétition, quand quelques-uns ont fait des choix de carrière douteux.
Voici la suite du XI publié la semaine dernière.
Andreï Archavine débute sa carrière au Zénith Saint-Pétersbourg où il fait ses classes et se révèle à la face du monde. Le milieu offensif (mais aussi ailier) remporte un championnat de Russie en 2007, une coupe UEFA en 2008 mais surtout atteint les demi-finales de l’Euro 2008 avec la sélection russe. Il se classe même à la sixième place du Ballon d’or en 2008 ! Remarqué par Arsenal, il y signe en janvier 2009. Ambitieux, il s’illustre dès ses premiers matchs. Il claque un quadruplé contre Liverpool. Est élu homme du match lors d’un huitième de finale retour de Ligue des champions contre Porto. Arsenal l’emporte 5-0, Archavine est impliqué sur 4 buts. Puis le néant. Seulement utilisé par Arsène Wenger comme joker de luxe il quitte finalement Arsenal dans l’oubli en 2013. N’arrivant pas à retrouver son niveau d’antan il cire le banc du Zenith puis est envoyé à Krasnodar à l’été 2015 où il ne joue que 9 matchs. Il termine sa carrière en novembre 2018 après une dernière aventure au Kazakhstan. La pépite n’aura jamais réussi à confirmer loin de ses terres.
Bojan compile tous les maux d’un joueur aux ailes brisées : syndrome de la comparaison, grave blessure, dépassé par la pression du haut niveau. Pur produit de la Masia, il bat tous les records de précocité avec le FC Barcelone à partir de ses débuts en 2007. Plus jeune Blaugrana à participer à un match de Ligue des champions, plus jeune buteur de Liga, plus jeune Barcelonais à atteindre les 100 matchs, plus jeune sélectionné avec l’équipe d’Espagne. Rapide, technique et agile, il est alors marqué au fer rouge du titre de « nouveau Messi ». En plus de cette pression supplémentaire, Bojan est victime de fortes crises d’anxiétés, il est allé trop haut, trop vite, il n’a même pas 18 ans. Après 2 saisons à regarder dans les yeux les Ronaldinho, Iniesta, Henry, Messi, il ne s’impose plus comme titulaire depuis que son anxiété le domine, il côtoie de plus en plus souvent le banc. Ecarté par Guardiola, il signe pour l’AS Roma en 2011 puis est prêté en 2012 à l’AC Milan. Deux énormes échecs, l’ombre de Messi plane sur lui, il souffre bien trop de la comparaison. Les projecteurs ne sont plus braqués sur lui au moment où il signe à l’Ajax puis à Stoke City où il évolue de 2014 à 2019 (avec deux prêts à Mayence et Alavès). En Angleterre il retrouve un bon niveau mais subit une rupture des ligaments croisés. Le sort s’acharne. Aujourd’hui à l’Impact Montréal, le « nouveau Messi » n’aura jamais pu exprimer son plein potentiel, rendu muet par l’ombre dévorante qui planait au-dessus de ses frêles épaules.
« Hatem, c’était Messi. Je l’ai vu faire des choses incroyables, mais il n’a pas fait les bons choix de carrière ». En quelques mots Karim Benzema résume la carrière de son ancien coéquipier à Lyon et en équipe de France espoirs. À l’heure du bilan, et hormis Benzema, la génération terrible de 1987 (Ben Arfa, Ménez, Nasri) est un énorme gâchis de talent. Hatem en est le cas le plus grave. Révélé à l’OL entre 2004 et 2008 il signe ensuite à Marseille après un bras de fer avec la direction lyonnaise. Puis à Newcastle après deux ans à l’OM. Après des débuts prometteurs, Nigel De Jong lui brise la jambe, double fracture du tibia péroné. Son retour après 6 mois d’absence vire au cauchemar, il est envoyé à Hull City en 2014 puis passe une année blanche lors de la saison 2014-2015. Le manque de professionnalisme du prodige franco-tunisien est pointé du doigt : fainéant, mal conseillé, ingrat, individualiste. Tout autant que son indéniable talent : dribbleur hors pair, explosif, très fin techniquement grâce à son pied gauche soyeux, une conduite de balle exceptionnelle, capable de créer comme de finir les actions. « Quel gâchis de talent pur… C’est criminel. » déclare Steve Bruce (coach d’Hull City) en 2015. Lors de la saison 2015-2016, l’enfant terrible revient en Ligue 1, à l’OGC Nice, il réalise une saison exceptionnelle (18 buts en 37 matchs) et émerveille tous les observateurs. Malheureusement l’espoir se meurt aussitôt. Hatem signe au PSG et, en froid avec l’entraîneur Unaï Emery, fait de la figuration. À 32 ans aujourd’hui et après une saison correcte à Rennes, Ben Arfa est désormais sans club. Son gâchis est à la hauteur de son talent, monstrueux.
La jeune pépite brésilienne débarque au Milan AC en août 2007. En provenance du SC Internacional avec lequel il s’est illustré notamment lors de la coupe du monde des clubs 2006. Suite à des problèmes de contrat il ne joue son premier match qu’en janvier 2008. Jouant au côté de son idole Ronaldo « Il fenomeno » et de ses compatriotes Kaká, Cafu et Ronaldinho, il se fait vite remarquer et la presse italienne s’enflamme. Très rapide, létal en un contre un, agile et bon de la tête, il réalise en 2008/2009 sa saison la plus prolifique (18 buts en 42 matchs). Dans la peau d’un titulaire indiscutable à l’aube de l’exercice 2009-2010, il empile les blessures et pépins physiques qui l’écartent peu à peu du onze et le privent même d’une sélection avec le Brésil pour la coupe du monde 2010. Le golden boy 2009 continue de côtoyer l’infirmerie et perd son statut d’idole de San Siro. Ses retours sont éclipsés par les performances du nouveau fer de lance milanais, un certain Zlatan Ibrahimovic. Excédés par ses blessures, les dirigeants lombards envoient Pato au Corinthians en janvier 2013. En 6 ans il joue pour 5 clubs différents sans jamais vraiment s’imposer. Après un passage en Chine convaincant, mais pas à la hauteur de son talent, Pato évolue aujourd’hui au Brésil au Sao Paulo FC. À 30 ans, sa carrière est derrière lui, bien loin de ses folles jeunes années milanaises.
Michael Owen est l’exemple de la précocité. Avec Liverpool, son club de coeur, il est sacré meilleur buteur de Premier League pour ses deux premières saisons complètes, magique. Il remporte avec les Reds deux League Cup, une FA Cup, un Community Shield et une coupe de l’UEFA, fantastique. Il est élu plus jeune Ballon d’or de l’histoire en 2001, historique. Petit et frêle, le gamin d’Anfield régale par sa vitesse, son goût de la profondeur, sa technique et son sens du but. À la surprise générale en 2004, le « boy wonder » est le nouveau galactique du Real Madrid, le club de ses rêves. Mais barré par la concurrence il se contente d’un rôle de joker. En 2005, Newcastle casse sa tirelire pour attirer « Magic Michael ». Désireux de se relancer, Owen promet de nombreux buts. Malheureusement son corps l’abandonne et ses blessures à répétition ne lui permettent pas de s’imposer chez les magpies en 4 saisons. Entre 2009 et 2012 il joue pour Manchester United où il récupère le 7 de Ronaldo. Il ne laissera pas la même trace que les illustres numéros 7 qui lui ont précédé (52 matchs pour 17 buts en 3 saisons). Il termine sa carrière dans l’anonymat à Stoke City à seulement 32 ans. L’allégorie d’un génie, trahi par son corps, a qui il à manqué ce soupçon de chance.
L’étoile filante brésilienne, un joueur éclatant mais à la carrière fulgurante. Lors de l’été 2001 le jeune Adriano débarque à l’Inter Milan en provenance de Flamengo. Directement prêté à la Fiorentina puis à Parme. Il se met très vite l’Italie dans la poche grâce à ses 24 buts en 37 matchs avec le club sicilien. Ce colosse supersonique, doté d’un pied gauche précis, une technique au-dessus de la moyenne et surtout d’une frappe chirurgicale. Il est très vite comparé à Ronaldo le Brésilien. L’Inter le rapatrie dès l’hiver 2003-2004. Le natif de Rio ne perd pas de temps pour mettre tout le monde d’accord. Zlatan dira de ce dernier qu’il est le joueur le plus impressionnant avec lequel il a joué : « He was an animal ». Mais tel un animal Adriano est instable et imprévisible. La mort de son père l’a détruit et cela se ressent sur le terrain. À partir de 2006 la chute commence. Sortie nocturne, alcoolisme, entraînements passés à l’infirmerie et dépression ne riment pas avec performance et carrière durable. Entre 2007 et 2012 il alterne entre retours au pays, belles promesses, retour en Europe, désillusions. « L’imperatore » comme il est appelé en Italie est monté très haut. Sa palette offensive paraissait illimitée, un joueur potentiellement plus complet que R9. Mais voilà, les frasques et la vie extra sportive mouvementée ont éclipsé les accélérations foudroyantes et les feintes de corps dévastatrices pour laisser un génie fragile et perdu, loin des titres et du succès.
Eliot Poudensan
Un talent gâché est un joueur qui n’a pas réalisé la carrière que son talent lui prédestinait.
Le foot est un milieu cruel, ou le talent pur ne suffit pas. Les joueurs doivent travailler, s’entraîner, gérer leur image et faire les bons choix tout au long de leur carrière. Certains se sont brûlé les ailes, d’autres ont été victimes de graves blessures à répétition, quand quelques-uns ont fait des choix de carrière douteux.
Je vais tenter d’établir un onze des talents gâchés du football mondial. Bien évidemment la liste ne peut être exhaustive. La liste des carrières brisées est longue, surtout chez les attaquants. Ce poste est celui qui est le plus mis en lumière et où il est plus facile d’éclabousser son talent car les performances sont mesurables et plus tangibles. Les attaquants font gagner des matchs tandis que les défenseurs et gardien ne font pas perdre.
Le portier mexicain, qui commence sa carrière au Club America en 2003, est un bon exemple de mauvais choix de carrière. Véritable idole en Amérique centrale suite à de très bonnes performances avec l’équipe nationale, il est impliqué dans une affaire de dopage qui fait scandale et qui va lui fermer les portes de grands clubs européens en 2011 alors que Manchester United ou encore le PSG étaient sur le dossier. Il signe finalement à l’AC Ajaccio où il se montre performant, sur l’année 2013 il réalise 146 arrêts et garde sa cage inviolée 12 matchs. Mais Memo Ochoa n’est pas fait pour jouer le maintien. Lors de la coupe du monde 2014 il illumine le match d’ouverture, face au Brésil, de parades et d‘arrêts réflexes. Il réalise une très bonne compétition et signe dans la foulée à Málaga où il ne jouera quasiment pas, puis Grenade, le Standard de Liège pour enfin retourner dans son club formateur au mercato estival 2019. Il n’aura donc jamais eu l’occasion de montrer ses capacités hors normes sur sa ligne dans un grand club.
Le français, dans une période où l’équipe de France est en reconstruction entre 2010 et 2014, représente un espoir de taille. Performant avec le Standard de Liège où il inscrit le premier but de l’histoire du club en Ligue des champions, il explose au FC Porto entre 2011 et 2014. Il étoffe son palmarès, participe aux bons parcours européens du club portugais et se montre parfois même décisif. Il s’envole ensuite vers Manchester City pour 53,8M avec le titre de « défenseur le plus cher de l’histoire ». Pourtant solide et dur sur l’homme, Mangala ne s’impose pas en Premier League. Il déçoit, enchaîne les prêts et les blessures, ne s’impose pas en équipe de France. Aujourd’hui à Valence, il n’est pas indiscutable et d’espoir, il est devenu un joueur quelconque.
Les débuts du jeune défenseur allemand sont tonitruants. Formé au Bayern Munich il gagne très vite la confiance du coach Louis Van Gaal lors de sa première saison en pro en 2009-2010. Titulaire en tant que défenseur central et parfois latéral, il s’illustre de par sa polyvalence, sa science du placement, sa puissance, un bon jeu de tête et tire même parfois les coups de pied arrêtés. Il a le profil parfait pour s’imposer durablement au Bayern et avec la Nationalmannschaft. Malheureusement la concurrence des nouvelles recrues mais surtout une rupture des ligaments croisés en 2012 stoppe en vol sa progression. Suite à une rechute il fait une année blanche. Ses retours sur les terrains se conjuguent toujours de blessures synonymes de longs mois d’absence. Aujourd’hui il joue pour le VfB Stuttgart, en seconde division allemande, la chute est vertigineuse.
Le latéral gauche néerlandais surnommé « le Pitbull » de par sa hargne sur le terrain se révèle au Feyenoord Rotterdam entre 2005 et 2007, on compare son style de jeu tout en puissance à Edgard Davids. À l’été 2007, Drenthe est transféré au Real Madrid pour 14M, mais d’espoir, il se mue très vite en déception. Dépassé par son nouveau statut il ne s’adapte pas au professionnalisme de la Maison-Blanche. Mal entouré, flambeur et friand de la vie nocturne de la capitale, il enchaîne ensuite les prêts dans des clubs moins huppés tels qu’Everton ou encore Alicante. Le meilleur joueur de l’Euro U21 2007 est définitivement transféré en Russie au FK Alania Vladikavkaz à l’été 2012. L’Hollandais à l’unique sélection collectionne ensuite les passages éclairs et oubliables dans des clubs sans ambitions. Malgré plusieurs annonces de départ prématuré à la retraite il évolue aujourd’hui au Sparta Rotterdam. Le « Pitbull » n’aboie plus sur personne.
Le « nouveau Zidane » est un fardeau trop lourd à porter. Yoann Gourcuff en est le meilleur exemple. Dès ses 20 ans il quitte le Stade Rennais pour le grand Milan AC. Malgré des débuts prometteurs la concurrence des Pirlo, Seedorf et autres Kaká est trop rude pour le milieu offensif. Il est envoyé en prêt à Bordeaux durant l’été 2008. Touché par la grâce il va éclabousser la Ligue 1 de tout son talent. Mené par le prodige breton, Bordeaux fait tomber l’ogre lyonnais et remporte le championnat. Gourcuff marque 12 buts, dont un bijou contre le PSG, et délivre 8 passes décisives, il termine 20ème du Ballon d’or. « On le compare à Zidane mais on va le comparer encore un peu plus » déclare Grégoire Margotton après son but de génie contre le PSG en janvier 2009. Mais la réalité est tout autre. La saison suivante, transféré définitivement à Bordeaux, il commence à être régulièrement blessé. Puis vient l’accident industriel. À l’été 2010 Lyon débourse 22M d’euros (une somme conséquente pour la Ligue 1 de l’époque). Le « nouveau Zidane » ne joue que 128 matchs en 5 saisons. Moqué par le public pour sa fragilité physique et mentale il ne relèvera jamais la pente. Après un passage quelconque à Rennes puis un autre fiasco à Dijon il résilie son contrat d’un commun accord avec le club et annonce sa retraite à 33 ans. Frustrant.
La suite la semaine prochaine…
Eliot Poudensan
L’avantage de recevoir n’est pas un mythe. Depuis sa création le foot évolue, la tactique se perfectionne, les joueurs repoussent leurs limites, la technologie s’invite, les règles changent, les records sont battus mais jouer « à la maison » reste un plus.
En effet plusieurs facteurs entrent en jeu pour faire des stades de véritables forteresses armées contre les équipes visiteuses : Anfield, le Signal Iduna Park ou encore le Camp Nou en sont de bons exemples. Alors comment une équipe peut-elle démarrer une rencontre avec un avantage dans un sport où seul le talent est censé trancher son issue ? Les facteurs sont infimes et impalpables mais les statistiques prouvent qu’elles ont un impact.
Dans le sport, et particulièrement dans le football, il est acquis que jouer à domicile représente un réel avantage sur son adversaire. Plus qu’une croyance populaire, cette vérité se confirme dans les statistiques : Une équipe gagne en moyenne 60% des points en jeux lors de matchs à domicile et marque 38% de buts en plus que les visiteurs. On observe qu’en Ligue 1 sur la saison 2018-19, 19 équipes ont gagné plus de points à domicile qu’à l’extérieur.
Cet atout que représente un match à domicile s’explique par différents facteurs. À commencer par le plus évident, le soutien du public. Effectivement les joueurs sont galvanisés par le 12ème homme qui donne de la voix pour son équipe. Les locaux ne veulent donc pas décevoir leurs supporters et mettent inconsciemment, ou pas, plus de coeur dans le jeu. L’ambiance de certains stades peut également déstabiliser l’adversaire qui aura du mal à donner le meilleur de lui -même, intimidé voire gêné par les cris, les chants et l’atmosphère hostile. Pour exemple, lors d’un match de ligue des champions à Galatasaray en 2017, le buteur de Leipzig Timo Werner est victime d’un malaise à cause du bruit infernal dans le stade. A l’inverse, des ambiances comme celle d’Anfield à Liverpool permettent aux joueurs de réaliser des exploits tels que le « come back » des Reds face au Barça en demi-finale retour de ligue des champions en 2019. Au-delà des joueurs, l’arbitre peut parfois être influencé par la pression de la foule. Selon une étude menée en 2007, en Premier League la foule à un impact sur l’arbitre à hauteur de 0,1 but par tranche de 10 000 supporters, particulièrement en cas de penalty.
Le fait de jouer à domicile est également un plus dans la mesure où les locaux n’ont pas de déplacement à effectuer. Le joueur passe du temps avec sa famille, dort chez lui, évolue dans un environnement qu’il connaît. Tandis que le visiteur entame un voyage parfois long et éreintant vers une autre ville voire même un autre pays pour se rendre dans un stade peu ou pas familier. De ce fait la force de l’habitude est un facteur très important. En effet les sportifs sont sensibles aux routines donc évoluer dans une enceinte habillée de ses couleurs, se changer dans ses vestiaires, avoir sa place, ses rituels, fouler sa pelouse, soutenu par son public. Tout ceci représente un confort mental qui peut influer sur le cours d’une rencontre. De plus la question du climat et de l’environnement n’est pas à écarter. Une équipe qui a l’habitude de jouer en altitude ou sous un climat hostile (neige, fortes pluies, vent, grosse chaleur) sera avantagé lors de la réception d’une équipe visiteuse. Des facteurs encore plus infimes peuvent aussi rentrer dans la balance. Une pelouse coupée court ou laissée longue, sèche ou très arrosée, une ligne de touche proche du public, une piste d’athlétisme. Tant de détails qui peuvent favoriser le jeu des locaux et gêner celui de l’adversaire même si ceux-ci relèvent plus de l’intuition et du constat que de la certitude vérifiée et incontestable.
Le match « à la maison » a donc un impact psychologique mais aussi physique et physiologique. Lors d’un match à domicile un athlète voit son taux de testostérone augmenter selon l’étude des chercheurs Wolfson et Neaves. Cette hormone permet d’être plus endurant, plus agressif, avoir plus de réflexes… Ainsi l’instinct s’ajoute à l’équation, l’instinct de préservation humain et la défense de son territoire ressurgissent lors d’un match à domicile. Inconsciemment les athlètes donnent le meilleurs d’eux même, poussés par un sentiment de survie, vestige du passé tribal de l’être humain. Ce sentiment est d’autant plus décuplé lors de derbys, où la question de la défense d’un territoire est exacerbée mais aussi une question d’honneur et d’égo. Parmi tous les joueurs c’est chez le gardien, dernier rempart de son équipe, qu’on remarque le taux de testostérone le plus élevé. Bien que difficile à appréhender ce phénomène a été démontré par les chercheurs anglais en 2003.
Pour finir on remarque aussi que suite à la construction d’un nouveau stade, une équipe met 6 à 9 mois avant de s’y accommoder et d’en faire vraiment son antre, sa forteresse à défendre. Preuve que jouer « chez soi » apporte un plus qui se traduit dans les résultats sportifs. Et font des stades, tels que la Bombonera, Santiago Bernabeu, le stade Ali-Samy-Yen de Galatasaray ou encore le Stade Vélodrome, de véritables terres promises et théâtre d’affrontements légendaires pour tout fan de football.
Eliot Poudensan